Le Château

18/06/2021

 Très tôt, ce fut la résidence préférée des sires du Faucigny. Le château fut témoin des fiançailles, en 1234, d’Agnès fille d’Aimon II, avec Pierre de Savoie, surnommé « Le petit Charlemagne ».

En 1241, Béatrix de Faucigny se fiance à Guignes, dauphin du Viennois.

C’est également dans le château qu’Aimon fait son testament en février 1234.

Agnès déclare en 1269, que son mari, Pierre de Savoie, a investi énormément pour fortifier le château.

Enfin en 1285, Gaston, vicomte de Béarn, second mari de Béatrix passe trois actes à Châtillon, son lieu de résidence.

Par la suite, le château fut de moins en moins la résidence des Faucigny. En 1308 il est la garantie de la dot du Comte de Savoie.

En 1335 Humbert en devient propriétaire, puis, dix ans plus tard il est entre les mains de Béatrice de Chalon d’Arlay jusqu’à la cession en 1406 à Amédée de Savoie.

A cette époque, le château était devenu un château-forteresse servant surtout de prison pour les criminels et les détenus politiques. En 1492, lors de l’insurrection des « Robes rouges », le château fut occupé par les insurgés.

On le dit brûlé en 1589 par les Bernois, bien que certains historiens signalent que ceux-ci n’auraient jamais atteint le col de Châtillon. Ils se seraient arrêtés au Martelet ou il y aurait eu l’église paroissiale et le cimetière. De toute manière, il devait y avoir une église, la chapelle étant réservée probablement au château.

Actuellement, les restes de ce château se résument à un haut pan de mur et une tour en ruine.

Après avoir vu la partie historique du château, intéressons-nous à la partie archéologique ;

Le domaine se compose de deux parties bien distinctes : une première enceinte entourant le plain-château où se trouvaient la chapelle, la cure et les granges ( dans cette première enceinte fut édifiée en 1780 la Mairie) puis la seconde partie était le château proprement dit, dont les murs se fondaient avec ceux de la première enceinte. Le chemin d’accès à l’ensemble était assez raide.

Au couchant, séparé par un fossé creusé dans le roc, il y avait un belvédère dominant toute la vallée de l’Arve, appelé « le Cuar », qui devait être un jardin sur une terrasse.

Le chemin d’accès débouchait sur deux cours successives ; l’habitation seigneuriale bordant la deuxième cour, dans laquelle on devait y trouver, au rez de chaussée : les cuisines, les caves ou celliers. Au-dessus, il devait y avoir une (peut être deux) chambres dont celle du seigneur, puis la grande salle ayant des cheminées adossées. Une chambre, au nord, s’appelait la chambre du frère Martin, l’aumônier du château.

Au-dessus des salles de cour, se trouvait une salle appelée la chambre ferrée puis la garde-robe. Il y avait également l’appartement de la Dame, ceux des étrangers et les chambres des écuyers. Mais la pièce la plus utile et la plus utilisée fut sans doute le Ratier.

Des travaux, souvent importants, se prolongèrent jusqu’en 1527.

Voici, écrit brièvement, la description de ce château de Châtillon, aucune archive n’étant en notre possession à ce jour.

L’importance de ce château ayant été signalée précédemment, nous y revenons pour dire ce qu’elle était réellement :

C’était en effet, le centre de la plus importante châtellerie du Faucigny.

Dans les textes, nous trouvons le mandement ou châtellenie de Châtillon, et, à dater de 1357 : mandement de Châtillon et Cluses. Soulignons au passage que la châtellenie de Châtillon était plus importante que le canton de Cluses au début du XX ème siècle.

Au XIIIème et XIVème siècle, elle comptait, en effet, treize paroisses, parmi lesquelles : Mieussy, Flétrier, Mégevette. L’abbaye d’Aulps y possédait de grandes étendues de près, vignes et bois.

Ainsi donc était notre château à l’époque glorieuse de Béatrix de Faucigny.

Il est bon de noter encore que la commune, essentiellement rurale, perdit progressivement l’importance qu’elle avait au temps des seigneurs de Faucigny. Elle connut l’émigration, puis vint la période d’implantation de petits ateliers d’horlogerie. En 1790, Châtillon comptait trente deux horlogers, spécialisés dans la fabrication de barillets de montre.

Nous avons beaucoup parlé du château, mais pas souvent de ses occupants.

En 1234, Agnès, fille d’Aimon II, baron du Faucigny, épousait Pierre de Savoie qui, en 1263, à la mort de son père Thomas, allait devenir comte titulaire de Savoie. Ses qualités politiques et militaires lui valurent le surnom de « Petit Charlemagne ».

Le 3 mai 1262, Agnès dicte ses dernières volontés en présence de hauts dignitaires ecclésiastiques et de Béatrix alors âgée de 28 ans. Agnès mourut le 11 août 1268, laissant à sa fille unique Béatrix, le patrimoine de ses ancêtres. Elle fut ensevelie, conformément à sa demande, dans la maison des Bénédictins de Contamine sur Arve.

L’histoire de Béatrix est si importante qu’il faudrait un volume pour l’écrire. Nous nous contenterons d’esquisser les grands traits de cette vie qui a compté dans l’histoire du Faucigny.

Formée à l’école de ses illustres parents, son éducation de reine, lui permit de faire front aux plus redoutables adversaires.

Elle avait à peine 7 ans que Guignes VII, comte d’Albon et dauphin du Viennois la demandait en mariage ; Pierre de Savoie répondit favorablement à cette demande le 4 décembre 1241 et le même jour l’évêque de Genève, Aymon de Grandson, signait dans l’église de Châtillon un acte menaçant Guignes VII d’interdit s’il violait ses engagements. Il faut dire que la méfiance était nécessaire car celui-ci avait déjà, par le passé, ignoré ses promesses envers Cécile, fille de Baralle, comte des Baux, puis envers la fille du comte de Provence. Malgré son passé, il restera fidèle à Béatrix. Cette union fut définitivement scellée en 1261. De cette union naquirent trois enfants :

Jean, décédé accidentellement lors d’une chute de cheval en 1282.Ce fut pour Béatrix une épreuve qu’elle supportera très difficilement.

Anne qu’épousa en 1273 Humbert Ier, baron de la Tour du Pin et Coligny.

Catherine qui resta célibataire.

Après le mariage de Béatrix, les événements se succédèrent ; son père, Pierre de Savoie mourut le 16 mai 1268, après avoir testé en faveur de son frère Philippe.

Sa mère, Agnès, devait suivre Pierre de Savoie et décéda le 9 août de la même année, investissant Béatrix dans sa petite souveraineté. Celle-ci ne devait plus connaître de repos.

Dès le lendemain, Philippe, comte de Savoie, signait avec Béatrice, sœur d’Agnès, un traité d’alliance offensive ; leur but : revendiquer une portion de terre du Faucigny. Malgré l’intervention de Margueritte, épouse de Saint Louis, la guerre était déclarée, avec une certaine fureur. C’est durant cette époque que mourut Guignes VII ; il fut enseveli en 1270 au monastère des Moniales de Prémol.

Béatrix et son fils furent prisonniers de leurs ennemis et ne seront libérés que le 15 novembre 1269.

Le 13 février de l’année suivante, ils signèrent un compromis afin de mettre bas les armes.

Béatrix était soulagée et profita de cette trêve pour étendre son domaine et nouer des alliances.

Une donation à Philippe de Savoie, faite le 28 février 1271 lui permit de gagner sa faveur.

En mars de la même année, elle achetait une partie du mandement de Beaufort.

Le 13 août, une sentence la réconciliait avec Béatrice de Thoire-Villars qui recevait à cette occasion les châteaux d’Aubonne et d’Hermance. La fortune de Béatrix, la grande dauphine, restait, malgré tout, très importante : outre quelques terres en Genevois (héritage paternel) elle possédait la totalité du Faucigny, de la Dranse jusqu’à La Roche et de Versoix à Flumet . Elle possédait en outre de nombreux châteaux parmi lesquels : Allinges le vieux, Féterne, Chillon.

Veuve depuis 1268, Béatrix allait convoler en secondes noces, le 2 avril 1273 avec Gaston de Bangé, vicomte de Béarn, frère du puissant comte de Provence. Ce dernier n’était autre que le père d’Eléonore, épouse de Henri III (roi d’Angleterre), de Margueritte épouse de Saint-Louis ; de Béatrice épouse de Charles d’Anjou (roi de Sicile) ; de Scanchette, épouse de Richard de Cornouailles (roi d’Allemagne)

Tante de 4 reines, l’influence de la Grande Dauphine devenait ainsi très importante.

Huit ans plus tard, son fils Jean épouse Bonne, petite fille d’Amédée V de Savoie.

Cette union fut brève, car le prince se tua à cheval le 24 septembre 1282.Béatrix est folle de douleur. Son testament, rédigé à la hâte, confirmera en quelques mots celui de son père.

Un véritable désespoir s’empare alors de Béatrix ; prenant dans ses bras son petit-fils Jean (l’aîné d’Anne), dans un moment d’émotion intense, elle lui fait donation, sans réserve des terres laissées par ses parents. En le confiant à la sauvegarde du roi des Romains, elle supplie ce dernier de l’aider à recouvrer les biens dont elle n’a plus la possession

C’est à ce moment de sa vie qu’elle décida de fonder la chartreuse de Mélan qui servira de mausolée à son cher défunt et où elle même viendrait le rejoindre.

Le décès de son second mari le 26 avril 1290 ne modifia en aucune manière la situation du Faucigny. Béatrix était de plus en plus isolée.

La consécration de l’église de Mélan le 28 décembre 1290 fut l’occasion d’une grande fête pour Béatrix, hélas attristée par le transfert de la dépouille de son fils Jean.

Signalons quand même que les travaux de Mélan furent suivis de près par Béatrix retirée dans sa villa ; retirée, peut-être, mais très active dans la gestion de ses terres.

Seuls les derniers mois de sa vie se passèrent dans le silence, loin du tracas des affaires.

Comment se sont déroulés les derniers instants de sa vie ? Nous l’ignorons. Seule la date de sa mort est certaine : le 21 avril 1310, elle avait 76 ans.

Ainsi prenait fin la vie tellement remplie de cette femme d’exception.